Première traduction intégrale en tchèque de L’Esprit des lois par Hana Fořtová-Dohnalkova

, par Volpilhac-Auger, Catherine

Montesquieu, O duchu zákonů II., Obrana Ducha zákonů (De l’esprit des lois II., Défense de l’Esprit des lois), traduction en tchèque, Prague, OIKOYMENH, 2015, 584 p.
(http://www.oikoymenh.cz/product_info.php?products_id=2159)

Tandis que les Lettres persanes ont été traduites en tchèque pour la première fois en 1955 et rééditées depuis (troisième édition en 1989), le chef-d’œuvre de Montesquieu, De l’esprit des lois, n’avait jamais été traduit en son intégralité. En 1947, le premier tome est paru, traduit par Stanislav Lyer.

Dans la notice introductive, Lyer explique que sa traduction a pris naissance pendant l’occupation allemande du pays « au moment où étaient supprimés ou délibérément négligés toutes les vertus civiques et les idéaux humains qui d’après Montesquieu fondent l’ordre de la société. » Une traduction plutôt « littéraire » qui manque de la précision nécessaire. De plus, les notes de Montesquieu y sont presque toutes absentes, et il y a très peu de notes de traducteur. Malgré ces défauts, cette traduction a été rééditée en 2003 ; dans les deux cas, sauf une mention de traducteur, rien ne laisse supposer qu’il s’agit uniquement du premier tome.

Ma traduction du premier tome de L’Esprit des lois a été publiée par la maison d’édition OIKOYMENH en 2010, le deuxième tome vient de paraître. Grâce à la générosité de la maison d’édition, la traduction s’accompagne du résumé critique du périodique janséniste, les Nouvelles ecclésiastiques, la Défense de l’Esprit de lois, le « Projet de censure de la Sorbonne » et les « Réponses et explications données à la faculté de théologie ». Pour la traduction du deuxième tome j’ai utilisé la version posthume de l’ouvrage de 1757, pour la Défense, la nouvelle édition publiée dans le cadre des Œuvres complètes de Montesquieu. (t. VII, 2010). La traduction est accompagnée des notes de l’auteur et des miennes, d’un index et d’une bibliographie. Aucun de ces textes n’avait jamais été publié en tchèque. Pour des raisons financières, la table analytique des matières (qui n’est d’ailleurs pas due à Montesquieu) n’a pas été reprise.

Les difficultés que je devais résoudre au cours de la traduction concernent d’une part la traduction des noms propres, qu’il s’agisse du livre XXI et des noms géographiques ou des livres sur les anciennes lois françaises et des noms des rois francs dont la transcription en tchèque n’est pas unifiée. Or je crois que le défi principal de la traduction d’un tel ouvrage consiste dans l’exigence de faire en même temps une traduction littérairement belle, et précise au sens philosophique. Car Montesquieu était un grand écrivain, auteur des romans tels les Lettres persanes ou Histoire véritable, en vrai fils des Lumières dont le style peut être dit musical. Mais c’est aussi un auteur politique, un philosophe qui traite des matières exactes, et il faut garder cette précision dans la traduction, saisir le sens des concepts et ne pas céder au désir d’embellir les phrases au détriment de leur signification. Ceci vaut pour tout l’ouvrage mais c’est particulièrement frappant quant au langage juridique, dans le livre sur les successions chez les Romains (XXVII) ou dans la théorie des lois féodales chez les Francs et dans les chapitres sur le combat judiciaire (XXVIII, XXX, XXXI).

Je tiens à remercier ceux sans qui ce projet n’aurait pas pu aboutir : Aleš Havlíček, mon ancien professeur à l’université et directeur de la maison d’édition OIKOYMENH qui nous a quittés subitement l’année dernière à l’âge de cinquante-neuf ans ; la traduction est dédiée à sa mémoire ; Barbora Patočková qui, par son minutieuse travail de rédaction, a beaucoup amélioré le texte final ; Petr Horák et Jiří Chotaš qui ont lu le manuscrit et dont les remarques m’ont été très précieuses.

J’aimerais aussi remercier le ministère de la culture de la République tchèque, l’Institut français de Prague et le Centre national du livre (Paris) qui ont soutenu la publication de la traduction.

Je remercie aussi l’Institut philosophique de l’Académie des sciences de la République tchèque qui m’a permis de me consacrer à ce travail.

Pour finir, je remercie la Société Montesquieu pour le projet de la publication des Œuvres complètes de Montesquieu et tous ceux qui ont participé au tome VII, de la Défense de l’Esprit des lois.

Hana Fořtová-Dohnalkova

Voir en ligne : OIKOYMENH